Il est assez difficile, je trouve, de parler des livres que l'on aime. Parce qu'il s'agit tout à la fois d'être juste et de donner envie.
Les livres que j'aime sont ceux qui me permettent de quitter la surface de la terre, ou alors, je crois ceux qui permettent de comprendre des éléments qui m'appartiennent au travers d'un prisme ou d'une lumière différents des miens.
Fille de Camille Laurens fut une chambre d'écho phénoménale, et sera une lecture qui ne quitte plus, une lecture qui marque, une de celle qui reste.
Et pourtant tout cela n'est que fiction. Et pourtant combien serons-nous à nous reconnaitre si clairement dans cette fiction ?
Le labyrinthe. Le vertige. La fiction. La réalité. Tout est Laurens.
Camille Laurens a construit sa bibliographie en deux temps. Le second portant l'étiquette littéraire "autofiction". Je pose ça là.
Dans Fille, en utilisant l'apostrophe "tu" elle va s'adresser tout à la fois à nous toutes, et puis à elle. Se raconter elle, à une distance qui va devenir un amplificateur pour nous toutes.
En trois parties elle va balayer nos vies, sur trois générations. La grand-mère, la mère et la fille. La France des années 60 à aujourd'hui. Et le sort qu'elle réserve à ses filles, et la place qu'elle leur laisse, cette société. Et la place des hommes assis sur leurs privilèges absolument pas prêts à y renoncer (qui le serait ?)
Pas une ligne, pas un interligne de pathos. Du juste, des faits. Un regard acéré. Sur la langue, celle qui nous est réservée, sur les actes, ceux qui nous sont réservés, sur leurs conséquences et enfin et bien sûr, on en arrive à ce "on se lève, on gueule et on se casse" (que l'on se finirait presque par se faire tatouer, oui, c'est vrai, merci Adèle.)
On croirait entendre nos mères, si elles savaient manier la langue comme Camille Laurens, on croirait regarder nos grands-mères, on croirait continuer de ne pas comprendre nos pères, ni même nos grands-pères. Ça résonne fort très fort et ça libère, tout aussi fort. C'est urgent de comprendre, de réaliser, d'approcher de si prés que nous sommes légions.
L'écriture et le rythme du récit sont tendus, intelligents, brillants. Certaines phrases comme des fulgurances, et on relit la phrase encore, mais oui, mais c'est bien sûr. C'est juste. Et qui suis-je pour déclarer cela ?
Je suis juste une fille, nom féminin (et ça suffit amplement)
1. Personne de sexe féminin considérée par rapport à son père, sa mère
2. Enfant de sexe féminin
3 (Vieilli). Femme non mariée
4. Prostituée
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