Lire Maylis de Kerangal c'est accepter d'entrer tout entier dans un univers.
Au détails prés que la construction d'un pont (Naissance d'un pont, éditions Verticales 2010) et l'opération à cœur ouvert (Réparer les vivants, éditions Verticales 2014) m'avaient sidéré par leur précision, mais laissé de marbre, entendez par-là que rien dans la narration ne m'avait embarqué.
Je développais alors une sorte de respect incroyable pour ce travail d'écriture subjuguant et exigeant (sans vraiment être touchée au plus intime), doublé d'un complexe d'infériorité un peu stupide j'en conviens.
C'était ainsi, je me disais : "Maylis de Kerangal, c'est trop pour moi (ne me demandez pas "trop quoi" ce serait difficile à définir).
Et puis, parce que je suis têtue, Un monde à portée de main. Et là, la magie cette fois a opéré.
C'est dans l'univers des peintres en décor et trompe l’œil que l'auteur.e nous fait entrer, tout entier.
Aux côtés de Paula Karst, que l'on suit sur le chemin qui la fera passer d'enfant à adulte, nous découvrons ces êtres passionnés par la texture, la couleur, et l'histoire de ce qu'ils auront à reproduire. Et là, tout s'éclaire. Peut être bien que Maylis de Kerangal nous parle aussi de son travail d'écrivain. De sa façon à elle d'envisager l'écriture.
Un monde à portée de main est un roman feutré, il porte ce silence dont aura besoin Paula pour exercer son métier. Il montre aussi ce couple parental qui regarde l'enfant devenir adulte, et c'est si juste, si juste vraiment.
Il offre tout autant cet amour immense - le premier de Paula - pour Jonas ce camarade colocataire qui entre dans la même école de peintre en décor à Bruxelles.
Et leur amitié avec la plus excentrique Kate.
Il offre tout autant cet amour immense - le premier de Paula - pour Jonas ce camarade colocataire qui entre dans la même école de peintre en décor à Bruxelles.
Et leur amitié avec la plus excentrique Kate.
On suivra Paula de Bruxelles, à Paris en passant par les studios de cinéma italiens, pour arriver sur un final époustouflant : Lascaux.
Impossible de refermer le livre, qu'on se le dise.
Impossible de refermer le livre, qu'on se le dise.
La coquetterie à l’œil de Paula, la question du réel et de la fiction, les parents venus célébrer la remise des diplômes et ne sachant pas où poser la bouteille de champagne dans une cuisine ne leur appartenant plus, le talent de Jonas, la justesse des liens quand on les découvre, l'assurance de Kate, la fourmilière d'ouvriers sur les chantiers, le nom des outils, le nom des couleurs, des textures, le regard sur ce que fut le cinéma et ce qu'il est en train de devenir, le pouvoir de ceux qui savent reproduire à s'y méprendre : époustouflant.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire