Il y a un an, nous parvenait une traduction de ce très beau roman. L'auteur était alors inconnu en France. Il vient de s'éteindre à l'âge de 61 ans, et c'est pourquoi j'ai eu envie de parler de lui et de son bouleversant roman. Richard Wagamese est un indien Ojibwe vivant au Canada. Les Objiwés sont la plus grande nation amérindienne d'Amérique du Nord répartie sur le Canada et les États-Unis.
Les parents de l'auteur et divers membres de sa famille sont passés par les pensionnats destinés aux indiens. Je rappelle que ceux-ci avaient pour but d'assimiler les jeunes indiens autochtones à la culture euro canadienne, en d'autre termes cela équivaut à l'abandon total de leur identité et de leur culture. Les enfants étaient enlevés très jeunes à leurs familles et nombreux sont ceux qui ont subi des humiliations, des coups, des viols. A cela s'ajoutaient des conditions de vie et d'hygiène déplorables. Certains y sont morts. Et je vous laisse méditer sur la date de fermeture du dernier institut : 1996.
Pourquoi diantre tous ces rappels historiques me direz-vous. Patience j'y viens.
Tout ça pour dire que le bonhomme porte avec lui l'histoire familiale et l'envie de redonner la parole aux indiens.
Il n'est guère étonnant de retrouver également dans Les étoiles s'éteignent à l'aube une recherche identitaire.
Alors trêve de bavardages, laissez vous emporter sur une vieille jument avec le père, le fils et l'esprit de la nature pour un périple au cœur d'un paysage rude et aride.
Franklin a 16 ans. Il a été élevé par un vieil homme qui lui appris à se débrouiller avec la dureté du monde, à chasser et à se tenir digne et droit. Son père Eldon, mourant, rongé par l'alcool l'appelle à son chevet.
Il lui demande de l'accompagner pour son dernier voyage afin d'être enterré dans la montagne comme un guerrier indien.
Dans cet ultime face à face le père et le fils vont enfin faire connaissance pour arriver à une sorte de pardon ou d'apaisement pour l'un et l'autre. Pour la première fois, Franklin entend son histoire et celle de ce père absent, inconséquent, alcoolique. Il l'a toujours déçu. L'adolescent a définitivement perdu les espoirs de l'enfance et est prêt à l'affronter sans se laisser attendrir.
Eldon revient sur son lent cheminement vers l'alcool pour masquer les blessures. Sa vie d'adulte commence par une trahison maternelle dont il ne connaîtra jamais les réels motifs. Puis il y a la lâcheté, les remords, une vie âpre, une vie d'errance, de mauvais choix. Une fugace période de bonheur avec une femme aimée mais très vite là aussi une propension à tout détruire.
Richard Wagamese donne de la voix aux taiseux, aux abîmés, aux durs à cuire dans une langue simple, à l'économie.
Les mots claquent et nous enrobent dans un univers minéral et végétal.
Le vieil homme porte la parole d'une sagesse de gens simples, au plus près de la terre et d'une vie modeste.
C'est un texte auquel on se heurte, un lent cheminement au plus prêt des démons intérieurs. Une gueule de bois sur une vie chaotique. Et l'espoir peut-être d'un possible apaisement lorsqu'on a écouté, accepté et admis pour continuer son propre chemin.
Je vous souhaite un bon voyage Monsieur Wagamese et je me plais à rêver que vous êtes enterré sur une montagne comme un guerrier indien.
Signé : Fantine
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire