En Octobre 2004, La Volte surgissait dans le paysage éditorial et publiait La horde du contrevent, le nouveau roman du — presque
— inconnu Alain Damasio : un roman inclassable, livre univers
époustouflant qui a immédiatement rencontré un vaste succès. Trois ans
plus tard, ce même éditeur rééditait le roman auquel il emprunte son
nom :La zone du dehors, première œuvre de Damasio, initialement paru chez Cylibris en 1997 et désormais disponible également chez Folio.
2084.
Sur un astéroïde en orbite autour de Saturne s’est développée Cerclon.
Ville repliée sur elle-même, cernée par une nature hostile, elle est le
seul refuge pour ceux qui veulent — qui peuvent — fuir une Terre agonisante, rongée par les guérillas et les pollutions.
2084. Orwell est loin. Le totalitarisme s’est paré des atours
d’une social-démocratie insidieuse. Dominée par le Clastre, système de
hiérarchisation de la population qui subordonne le rang de chaque
individu à l’appréciation de tous, la société de Cerclon est hyper
sécurisée, hyper sécurisante : démocratie « parfaite », à la stabilité
assurée par le contrôle de tous par tous, par la soumission consentie au
contrôle, au self-control liberticide, au nom de la liberté pour tous…
Chacun sa place dans un monde qui n’oublie personne. « Souriez, vous
êtes gérés ! »
La zone du dehors
est l’histoire de la Volte, groupe (ré)volutionnaire qui appelle à la
libération des forces de vie, au libre-arbitre, à la création, au combat
permanent contre les pouvoirs insidieux des sociétés
de contrôle décrites par Foucault ou Deleuze. C’est l’histoire d’une
volution, d’une « révolution sans ressentiment, délivrée de la rancœur
ordinaire du militantisme revanchard et piégé, une révolution qui invente, alterne, offre ».
Avec
cette œuvre résolument libertaire, engagée et enragée comme peut l’être
une œuvre de jeunesse, Alain Damasio s’appuie sur Nietzsche et
l’internationale situationniste pour livrer un roman percutant, une
fable philosophique et politique à l’action captivante, servie par une
plume incisive et très à l’aise dans cette narration à plusieurs voix qui sera pour bonne part dans l’efficacité de La horde du contrevent. Critique lucide des perversions de la social-démocratie à l’occidentale, d’une forme de totalitarisme jamais autoritaire ni autocratique (plus proche donc de celui évoqué par John Brunner ou Ira Levin que par Orwell ou Huxley), La zone du dehors fait mouche, dérange, et vient s’ajouter à la longue liste des livres qui donnent, s’il en était besoin, la preuve que la science-fiction peut être avant tout un espace de réflexion d’une terrible efficacité.
Signé : Le voisin du dessus
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