Pauvres
petites filles riches...
Texas,
1957.
Cece
Buchanan et Joan Fortier sont deux amies issues du même milieu :
la classe riche de Houston, où les hommes ont fait fortune grâce à
l’économie florissante du pétrole.
Elles
se connaissent depuis toujours et semblent avoir tout partagé,
jusqu’aux secrets les mieux gardés.
Cece,
jeune épouse et mère d’un petit garçon, est sage, discrète, et
totalement dévouée à son amie, alors que Joan est l’absolu
opposé : aventureuse, solaire et égoïste, elle ne semble
vivre que selon ses propres intérêts. Allant de fête en fête, et
d’amant en amant, sa vie ressemble à celle de ces stars
hollywoodiennes qu’elle admire. Elle s’éloigne peu à peu de
Cece, qui s’inquiète, s’interroge, et revient sur le passé :
qui est vraiment Joan Fortier ? Elle ne le sait plus. Mais
l’a-t-elle jamais vraiment su ?
Pour
obtenir des réponses à ses questions, Cece va s’accrocher à
cette amitié coûte que coûte, et suivre Joan dans toutes ses
extravagances. Quitte à mettre son mariage en péril.
Au
premier abord, Une amie très chère n’avait pas
grand-chose pour me plaire. Il est vrai que mes lectures m’entrainent
généralement dans le monde des paumés et marginaux en tous genres
plutôt que vers les histoires de femmes qui n’ont connu que le
confort d’une vie où tout leur était servi sur un plateau. Ou
dans un seau à glace. Ce qui est le cas de nos deux héroïnes.
D’autant
plus que le nom d’Anton DiSclafani ne me disant vraiment rien, je
suis allée faire une recherche concernant les précédents ouvrages
de cet auteur, et je suis tombée sur ce titre : « Le
pensionnat des jeunes filles sages ». Aïe !!! Avec un
titre aussi niais, ça commençait mal entre l’auteur et moi.
Mais
je me suis dit ensuite qu’il valait mieux mettre le titre de ce
premier roman sur le compte d’une erreur de jeunesse (ou de
l’éditeur).
Et
puis, j’étais bien tentée par une lecture « légère ».
Et grand bien m’en a pris.
Car,
sous ses faux airs de superficialité, Une amie très chère
est tout de même bien plus profond qu’une des nombreuses coupes de
champagne qui seront bues tout au long du récit.
L’alcool
y est certes omniprésent, comme la fête et l’argent, mais c’est
ce qui nous permet de mieux saisir la vacuité du microcosme doré
dans lequel évoluent Joan et Cece. Car une fois la fête finie (The
After Party, c’est le titre original), que reste-t-il ?
Beaucoup
de solitude, car les deux héroïnes sont, chacune à sa façon,
prisonnières de ce que les autres attendent d’elles. Et une
impression de gueule de bois, renforcée par le sentiment d’une
amitié qui s’en va.
Un
univers luxueux et suranné, extrêmement bien dépeint (et sans
doute bien documenté. Le Shamrock, lieu de prédilection des deux
amies a existé), assorti d’une fine description des personnages et
des tourments de la narratrice. Une intrigue qui m’a tenue en
haleine tout le long du récit malgré un dénouement un peu policé
à mon goût. Une jolie écriture. Et enfin des thèmes passionnants
comme la condition des femmes dans les années 50, les relations
entre le personnel de maison pauvre et les employeurs riches,
abordés, certes en filigrane, mais avec pertinence. Voici les
raisons qui m’ont rendue accro à ce livre.
Je conseille Une amie très chère à tous ceux qui : veulent se rafraîchir au bord d’une piscine une coupe de Daïquiri à la main. Aiment bien les histoires de malheur des riches. Aiment aussi les histoires d’amitié qui sont des histoires d’amour. Et à tous ceux qui comme moi s’écrient parfois lorsqu’ils lisent : «Je suis sûre que ce sera bientôt un film !», et qui font eux aussi le casting dans leur tête. Pour ma part, je mets Sofia Coppola à la réalisation.
C’est ce qui est magique avec la lecture, on devient aussi producteur de cinéma !
Signé : La Tangente
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