22/01/2016

CONSUMES de David Cronenberg

On ne l’attendait pas mais il est là, sur nos tables, le premier roman de ce jeune écrivain septuagénaire, écrit alors qu’il est un des cinéastes les plus importants de notre époque. Cronenberg n’a cessé de le marteler un peu partout: ceci est bien un roman, et absolument pas un scénario recyclé et ça se lit, ça se sent, la qualité de l’écriture est là pour le prouver.
On ne racontera rien ici de ce vrai-faux roman policier vaguement futuriste (en fait ni roman policier, ni de science-fiction), déguisé par endroits enslasher hardcore avec scènes de sexe très explicites, descriptions organiques appuyées, floraison de détails technologiques qui sont les grands marqueurs, selon l’auteur, de l’implication de chaque individu dans son époque. Pas d’erreur, nous sommes bien à l’intérieur du cerveau du réalisateur de Chromosome 3Faux-semblants et Existenz. Nous sommes fait des technologies que nous consommons et des fantasmes qui nous consument. Nos humeurs imprègnent notre quotidien, le moindre de nos ustensiles high-tech absorbe notre organisme, nous sommes ce que nous voyons et nous croyons en ce que nous voulons voir.  Visions orgiaques ou infernales, écœurantes ou troublantes, d’un corps éparpillé aux quatre coins d’un appartement via un panoramique sur Skype, traces de
sperme laissées sur l’écran tactile de son portable après l’amour, utilisation tordue des technologies de photocopie 3D, on oscille sans cesse entre le glacé, le bouillant, entre le subtil et le prosaïque le plus terre-à-terre et tout cela pour nous dire, encore et encore, que le corps et l’esprit chez David Cronenberg, formeront toujours cette entité monstrueuse et mutante que nous façonnons à notre guise, et nous échappera sans cesse.
En attendant de voir le film (lui-même aimerait bien le voir, mais réalisé par un autre), lisez de toute urgence Consumés, ce roman fou, hybride et monstrueux. Les inconditionnels du cinéaste canadien s’y retrouveront sans problème, les autres pourront se harnacher et bien serrer leur casque parce que quand même, ça secoue et éclabousse un peu.  Du Cronenberg, quoi.

Signé : RongeMaille

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