14/04/2022

QUE LE DIABLE M'EMPORTE de Mary Maclane

C’est étrange. Étrange d’avoir refermé ce roman et d’avoir instantanément pensé aux podcasts que j’affectionne et aux femmes qui les réalisent : La Poudre, Le Cœur sur la table, Un podcast à soi….

J’ai instantanément pensé à un entretien mené par ces trentenaires assez brillantes et Mary Maclane qui aurait à ce jour 141 ans.
Mary Maclane est née en 1881 au Canada. 

En réalité j’aurai adoré que nous puissions entendre, au travers des questions de Lauren Bastid ou Victoire Tuaillon, la voix de Mary Maclane, sa voix et son effronterie, son insolence et sa liberté, qui même (surtout ?) en 2022 feraient alors dresser bien des poils sur les avant-bras. 

J’ai aussi pensé à la solitude qui a dû être celle de Mary Maclane. Que veut donc dire vivre en étant habitée par une pensée avant-gardiste ? Que signifie vivre dans une société où l’on ne peut pas être entendue pour autre chose que de la provocation, par ses pairs ? 

Mary Maclane ne répondra pas, mais la lire c’est accepter d’entendre une femme en colère, une femme attirée par une autre femme, une femme qui s’ennuie mortellement dans cette humanité bien trop étroite pour elle. Une femme capable de dire ses zones d’ombre, de lâcheté, autant que celles de ses courages, de sa vivacité, de la finesse de son analyse.
Je suis loin de prétendre être une grande lectrice, mais je n’avais jamais entendu une telle voix. Une telle énergie, une telle envie d’en découdre. Maclane accepte d’habiter réellement les marges, les envers de décors, les hors du cadre. Tous. Elle est l’absolu « négatif photo » de la bien-pensance, l’autre pôle, l’extrémité, l’inverse. Et elle le porte haut et fort, et ça fait désordre. 

Que le diable m’emporte est son journal.
Elle l’a écrit en 1902, âgée de 19 ans. 

23 février : « Je suis un égoïste petit animal vaniteux et impudent, certes, mais après tout que suis-je, sinon une seule et immense agglomération de Désirs ? Et lorsque quelqu’un surgira de la colline stérile pour satisfaire le désir, mon triomphe sera humble, humble. » 

13 mars : « Je suis venue au monde avec des yeux pour voir et des oreilles pour entendre, et je questionne la Vie. Doit-on s’en étonner ? Est-ce si étrange ? Devrais-je me contenter de voir et entendre ? D’autres que moi jouissent de bien autre chose. Qu’y-a-t-il d’atroce à ce que je ne me satisfasse pas de ce que j’ai ? Ta servante est-elle un chien ? » 

Que le diable m’emporte a été vendu lors de sa parution à 100 000 exemplaires le premier mois.

Puis et comme d’habitude il a été mis au pilori par les critiques et les lecteurs conservateurs. 

Une autrice passée sous silence, comme d’habitude. Invisibilisée. Comme toujours. 

Il faut lire Mary MacLane, offrir et se prêter ses livres, noter les titres de ses ouvrages dans les cahiers de suggestions des bibliothèques, les commander chez les libraires. Visibiliser Mary Maclane

S'il fallait essayer de vous convaincre en musique et en toute subjectivité : 


MP Soriano aka Range le Sas


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