19/04/2021

AUX AMOURS de Loïc Demey

 Loïc Demey est entré dans ma vie comme serait entrée une immense surprise solaire, une éclaboussure de bonheur, une grande secousse littéraire. Il est entré dans ma vie avec Je d'un accident ou d'amour, c'était en 2016 (soit deux ans après sa parution) aux éditions Cheyne (je crois qu'ils en sont à la neuvième réédition)

Sans le moindre verbe, Demey nous racontait le vertige d'une rencontre, la folie, la fureur d'un début d'histoire quand elle est une évidence. Il inventait une langue pour plus de sensation, un rythme pour plus d'élan. Il devenait sous nos yeux, un Auteur.

Son texte m'avait tellement chamboulée, que j'avais cherché autour, au-dessus, à côté et au-dedans. J'avais fini par trouver et découvert Prendre corps de Ghérasim Lucas (mis en musique de façon magistrale par Arthur H).

Je m'étais alors demandée si Loïc Demey, n'avait pas, en signant Je d'un accident ou d'amour, inventé un écho, un texte dans la lignée du poète roumain, un texte aimant un autre texte ?
Je m'étais alors demandée cela.

Voici qu'il s'en revient avec Aux amours, qui est cette fois une seule et unique phrase. ( Pas de point, pas de majuscule. Une seule phrase. ) Et qu'il choisit d'annoncer sur le bandeau de la couverture : "Je n'attends pas la fin du monde, je t'attends" extrait du poème fleuve de Gaston Miron, poème intitulé La marche à l'amour. 

Alors, je me dis que peut être Loïc demey, est au delà de tout amoureux des poèmes, des mots, des romans, et qu'il joue sans cesse à combler la fin de ses lectures. La fin de ses plus belles lectures. La fin de ses rencontres. En y ajoutant, comme quand nous étions des enfants, des contraintes à la manière de ces petites phrases connues de tous "si nos pieds touchent les traits, on a perdu", l'abracadabra de l'écriture à contrainte.

Il restitue une rêverie amoureuse gigantesque. Comme si un homme s'allongeait dans l'herbe et, suivant les nuages des yeux, se mettait à rêver puissamment de celle qui lui ferait la surprise d'être son amoureuse, en grand. Et Demey n'en finit pas de jouer, déposant entre les lignes, un manifeste pour la rêverie, pour la lenteur et les détours, pour les manières d'un autre temps, instillant ici et là, que finalement aimer c'est aussi aimer l'état dans lequel nous plonge cet espoir fou, cette attente, cette excitation. Peut être même que c'est soi-même que l'on aimerait au-delà de tout. On croise le petit prince, Bachelard et cet Otto Sfortunato et sa fable juste dingue : tomber amoureux d'une ombre, s'enivrer durant toute la durée de la recherche (à quelle femme appartient cette ombre ?) et qui, une fois rencontrée....

Les textes de Loïc Demey ne se racontent pas. Ils se lisent, se ressentent, ils se partagent,  ils se prescrivent, ils s'offrent, mais ils ne se racontent pas.

Il faudrait une musique construite sur des nappes, il faudrait un titre épique à faire exploser un cœur, il faudrait un titre d'un autre temps, lent et rapide, doux et fort, mais il faut n'en choisir qu'un seul, alors, moi j'ajouterai bien - pour vous dire autrement cette lecture - Staraflur de Sigur Ros

 

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