Au cœur de cette période que j’exècre pour son hypocrisie totale (j'ai décidé de façon totalement arbitraire de commencer tous mes articles sur les livres sortis à cette date, de cette manière, veuillez par avance me pardonner) - la rentrée littéraire- lire Les sorcières de la République c'est un peu comme assister à un spectacle total, vertigineusement réussi, au cours duquel on aurait envie de crier "mais quel miracle mon dieu !"
Chloé Delaume que j'avais déjà lu mais que j'avais surtout vu sur scène et dont la générosité m'avait très largement séduite, signe là, un roman dont je vais avoir bien du mal à vous exposer l'enthousiasme qu'il a suscité pour moi.
Je vais donc commencer par me tenir à la rampe des faits. 2062, en France. Au (feu) stade de France, nous assistons yeux écarquillés au procès de la Sibylle. Reprenons, en 2012, comme la fin du monde n'a pas eu lieu, le Parti du Cercle (soit les déesses grecques descendues de l'Olympe) instaurent un matriarcat et place en présidente de la république Elisabeth Ambrose. Sauf que trois ans plus tard, soit en 2020, la population vote pour Le Grand Blanc : une amnésie collective de trois années, ni plus, ni moins. Revenons en 2062 au feu stade de France, la Sibylle (Parti du Cercle) est jugée pour cet acte. Le président de la république est alors Barnabé Pouguel-Castelain. Un jeune homme adoré par la population.
Delaume construit son roman sur des chapitres qui à eux tous constituent les 5 jours et 5 nuits du procès.
Les sous-chapitres peuvent être les commentaires de la journaliste télé (type BFM) qui travaille 24h/24h. D'autres les interventions de la Sibylle qui retrace le cheminement de son parti et justifie la proposition du référendum pour ou contre le Grand Blanc. D'autres encore des messages envoyés par l'Etat pour nettoyer les cerveaux ! Ainsi ces sous-chapitres peuvent s'intituler #live, ou #load ou encore #warning.
Là, là, vous le percevez le savant mélange mythologie/présent/futur si proche que l'on finirait presque par le gober tout cru ? Vous l'apercevez cette boucle historique que nous met sous le nez Delaume au sommet de son art ?
Ecoutez, c'est pas compliqué, l'image qui me vient systématiquement quand je souhaite parler de ce roman à mes proches, c'est le cerveau de l'auteur branché sur des machines ! C'est 2000 ans d'histoire des femmes et de leur oppression qu'elle aurait à elle seule absorbé aussi ! Il en résulte une lecture qui fait pousser des petits cris jubilatoires, des cris d'effrois, des cris perçants, des hurlements de rire ! L'antidote ? Une seconde lecture crayon en main, où l'on s'arrête à chaque page, pour noter, souligner, entourer ! Mais quelle justesse, quelle clairvoyance et lucidité sur notre époque. Le mystère résidant dans le fait que l'auteur n'aurait oublié aucune ramification de notre société malade : attentats, politiques, outils de communication, consommation, famille, morale, éthique, sexualité etc...
Dieu du ciel, mais où habite donc le dealer génial de Delaume ?
Il me faut, oui, il me faut son adresse ! Là, voyez-vous, si nous étions dans le roman, un message de prévention contre les méfaits de la drogue surgirait, il serait suivi d'un conseil de visionnage de vidéo de chaton, histoire d’apaiser nos cerveaux choqués !
Du pur délire de haute volée, réussi comme ce n'est pas permis, écrit d'une main de grandE maître. A moins qu'il ne s'agisse d'une prêtresse, allez savoir !
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