Cinq ans que Iain Levison ne nous avait pas donné de ses nouvelles, cinq ans que nous étions orphelins de la veine crapuleuse de cet écrivain écossais, américain d’adoption, qui nous avait tellement fait rire avec ses Tribulations d’un précaire ou son déjà classique Un petit boulot.
Abandonnant pour une fois ses personnages de losers quatre étoiles dont il est un peu le porte-parole (et qui sont aussi pour lui comme des souffre-douleurs de papier), Levison ne s’écarte pourtant pas de ce qui le préoccupe habituellement dans ses livres, à savoir la main-mise du libéralisme à outrance et de l’individualisme forcené sur nos sociétés ultra-consuméristes et, partant de là, sur le comportement de chacun de nous. Cet auteur possède l’art et la manière de s’offrir une batterie de tests plus sadiques les uns que les autres sur ses personnages, via les situations les plus grotesques, et les plus quotidiennes.
Dans Ils savent tout de vous, il n’y a plus de chômeur longue durée prêt à tout pour s’en sortir, ni de brave type accusé à tort d’être un tueur d’enfant, ce genre de blague. Ici, Levison s’accapare les codes du thriller comme il s’en faisait à la pelle dans les années 70 et 80: services secrets ultra-secrets à la solde de l’Etat Américain, barbouzes sur-entraînés, big brother watching tout le monde, et… télépathes activement recherchés pour, officiellement, en finir par exemple avec les interrogatoires « musclés » de l’Armée Américaine en Afghanistan et ailleurs. Mmouai…
Soit l’officier Snowe, à ma gauche, petit flic plus qu’honnête qui se rend compte que quelque chose se passe dans sa tête: très vite il cherche à s’en servir pour quelques plans-drague foireux (ça, c’est le Levison qu’on connait bien), et s’aperçoit que c’est également de la balle pour coffrer sans problèmes des sales types qui ont des choses à lui cacher. Et Denny à ma droite, qui en est à une phase d’accomplissement suprême de ce don de Dieu, et qui est déjà surveillé comme le lait sur le feu par les services secrets car il se trouve… en prison, et plus précisément dans le couloir de la mort. Denny s’évade, et ce qui va arriver va surprendre tout le monde.
Et nous voilà revenus au temps joyeux des thrillers paranoïaques à la Robert Ludlum, Robert Sheckley, Graham Masterton et consorts. Où l’on voit bien que ce n’est pas l’exercice de style qui intéresse Levison, même s’il fait ça très bien, mais le sous-texte politique. Quel cauchemar ce serait en effet, pour nos Etats manipulateurs et avides de contrôle, si l’humanité toute entière s’avisait de communiquer sans modem, sans clavier ni écran tactile, sans qu’on puisse nous espionner.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire