09/03/2016

LA DENONCIATION de Bandi

Dans quelques semaines aura donc lieu le Salon du Livre de Paris avec la Corée pour invitée d'honneur. Très bien, et gageons que le sus-nommé Bandi manquera à l'appel. Dans son éclairante préface intitulée Une luciole en Corée du Nord, Do He-Yoon retrace la genèse incroyable de ce manuscrit, exfiltré vers la Corée du Sud via la Chine, au péril évidemment de celui qui lui a fait passé la frontière sous le manteau, et surtout de ce mystérieux Bandi, écrivain sans identité, et cas unique de voix s'élevant de l'intérieur contre le régime de Pyongyang. Inutile de préciser qu'au terme de la lecture des nouvelles de La dénonciation, on se surprend à croiser les doigts pour lui, tant il paraît impensable qu'une telle voix dissidente subsiste encore longtemps là-bas.
Suite de sept  fictions courtes qui toutes s'achèvent sur une note glaciale, ce livre nous raconte le quotidien et le système de survie au jour le jour d'un peuple inlassablement comprimé, étouffé et ignoré par le pouvoir. Rien qu'on ne sache déjà en somme, mais cela nous est raconté avec cette note d'humanité et d'empathie qui rendent les personnages de ces histoires bien vivants, marionnettes pathétiques d'un pouvoir qui les piétine. Et c'est ce qui fait le plus mal dans ces portraits: leur appétit de vivre malgré les désillusions quotidiennes ou, au pire, leur foi aveugle en un régime qui ne leur veut que du mal.

Si Bandi sait nous faire entendre la voix des siens dans cet enfer, difficile en revanche de remonter à la source de ses références d'écriture. Portée par une fluidité narrative assez déconcertante, sur un ton faussement naïf, on pense parfois à Traven ou à Panaït Istrati dans cette manière de nous raconter la tyrannie et la misère sans faire de sentimentalisme, ni de cynisme. Un juste équilibre que Bandi ne perd jamais.

Et c'est ainsi qu'il qualifie ces nouvelles:

Elles sont aussi arides que le désert,
Aussi brutes que la prairie sauvage,
Aussi pitoyables qu'un malade,
Aussi maladroites qu'un grossier outil en pierre,
Mais, cher lecteur,

Je t'en prie, lis-les !

 Signé: RongeMaille

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