14/01/2019

NINO DANS LA NUIT de Capucine et Simon Johannin

C'est difficile de parler d'un livre que l'on a adoré prendre en pleine poire. 
Difficile. Car il faut éviter les superlatifs à n'en plus finir, et ne pas se contenter de déposer là que des passages du roman, ce qui reviendrait à ne pas faire le job. Se poserait alors et aussi la question douloureuse : "quels passages ?".

Simon Johannin je l'avais découvert en 2017 avec L'Eté des charognes, paru aussi chez Allia.
Roman virtuose récit d'une enfance dans les montagnes noires, dans les fermes ultra-modernes où les carcasses des voitures côtoient les charniers de brebis en attendant l’équarrisseur.
Où les adultes éructent et protègent les enfants de leurs bras tatoués. Ou pas.
C'était un roman organique et viscéral. Un uppercut dans nos intestins de bobos bien assis.
Johannin ne donnait aucune leçon il reposait - avec une classe au dessus de la mêlée - la question de la responsabilité des adultes dans la vie des enfants. Et ce quel que soit l'endroit où l'on naît.
J'avais d'ailleurs écrit ici-même sur L'été des charognes

Mais Capucine Johannin, elle je ne l'a connaissais pas.
Connectée à leurs profils sur les réseaux sociaux, je peux vous dire que je l'attendais, leur roman signé à 4 mains.

Et le voilà, ce Nino dans la nuit splendide. L'histoire de Nino Paradis et son grand amour Lale. L'histoire de leurs deux fois 20 ans collés au bitume, aux appartements insalubres sous-loués à des marchands de sommeil, l'histoire de cette pauvreté vraie de vraie sur laquelle on ferme les yeux. C'est l'histoire de leurs petites magouilles et de leurs grands blancs, ces fuites collées à grand coups de goulots, de petites pilules ou de lignes blanches.
C'est l'histoire de leur amour immense au cœur de tout cela.
C'est aussi la suite de cette enfance dans la ferme, en quelque sorte, des années 80/90. Ce ne sont plus les montagnes noires, mais la banlieue parisienne. Ce ne sont plus les bêtes, les chiens et les montagnes, ce sont les dealers, les esclavagistes modernes, les supermarchés qui dégueulent et la défonce d'une jeunesse qui fuit le jour.

J'ai retrouvé la matière viscérale et organique de Simon et j'y ai découvert en plus un rythme bien plus emporté, probablement un coup de Capucine.
J'y ai retrouvé cette écriture comme un port de tête altier de Simon, avec une grande dimension en supplément, celle de l'écriture qui aspire toute l'expérience contée, incontestablement la présence de Capucine. Quand la littérature prend la forme même du récit ! 

Simon et Capucine ont réussi le tour de force de planter de la poésie partout, du macadam aux rails de coke, des sérieux emmerdements aux corps qui se serrent pour lutter contre la faim.

C'est magistral, puissant et sombre autant que solaire. Voilà, le superlatif arrive en courant, cela veut dire que vais m'arrêter là.
Acheté à 18h et terminé à 3h du matin. Qu'est ce que je peux ajouter ?

Nino dans la nuit est sorti accompagné du clip du collectif Contrefaçon !





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